CONVENTION EUROPEENNE
DES DROITS DE L'HOMME
Titre I -
Droits et libertés
Article 2 -
Droit à la vie
1. Le droit de toute personne à la vie est
protégé par la loi. La mort ne peut être
infligée à quiconque intentionnellement, sauf en
exécution d'une sentence capitale prononcée par un
tribunal au cas où le délit est puni de cette peine par
la loi.
2. La mort n'est pas considérée comme
infligée en violation de cet article dans les cas où elle
résulterait d'un recours à la force rendu absolument
nécessaire:
a. pour assurer la défense de toute personne contre la violence
illégale;
b. pour effectuer une arrestation régulière ou pour
empêcher l'évasion d'une personne
régulièrement détenue;
c. pour réprimer, conformément à la loi, une
émeute ou une insurrection.
Article 3 -
Interdiction de la torture
Nul ne peut être soumis à la torture ni à des
peines ou traitements inhumains ou dégradants.
Article 4 -
Interdiction de l'esclavage et du travail forcé
1. Nul ne peut être tenu en esclavage ni en servitude.
2. Nul ne peut être astreint à accomplir un travail
forcé ou obligatoire.
3. N'est pas considéré comme "travail forcé
ou obligatoire" au sens du présent article:
a. tout travail requis normalement d'une personne soumise à la
détention dans les conditions prévues par l'article 5 de
la présente Convention, ou durant sa mise en liberté
conditionnelle;
b. tout service de caractère militaire ou, dans le cas
d'objecteurs de conscience dans les pays où l'objection de
conscience est reconnue comme légitime, à un autre
service à la place du service militaire obligatoire;
c. tout service requis dans le cas de crises ou de calamités qui
menacent la vie ou le bien-être de la communauté;
d. tout travail ou service formant partie des obligations civiques
normales.
Article 5 -
Droit à la liberté et à la sûreté
1. Toute personne a droit à la liberté et à
la sûreté. Nul ne peut être privé de sa
liberté, sauf dans les cas suivants et selon les voies
légales:
a. s'il est détenu régulièrement après
condamnation par un tribunal compétent;
b. s'il a fait l'objet d'une arrestation ou d'une détention
régulières pour insoumission à une ordonnance
rendue, conformément à la loi, par un tribunal ou en vue
de garantir l'exécution d'une obligation prescrite par la loi;
c. s'il a été arrêté et détenu en vue
d'être conduit devant l'autorité judiciaire
compétente, lorsqu'il y a des raisons plausibles de
soupçonner qu'il a commis une infraction ou qu'il y a des motifs
raisonnables de croire à la nécessité de
l'empêcher de commettre une infraction ou de s'enfuir
après l'accomplissement de celle-ci;
d. s'il s'agit de la détention régulière d'un
mineur, décidée pour son éducation
surveillée ou de sa détention régulière,
afin de le traduire devant l'autorité compétente;
e. s'il s'agit de la détention régulière d'une
personne susceptible de propager une maladie contagieuse, d'un
aliéné, d'un alcoolique, d'un toxicomane ou d'un vagabond;
f. s'il s'agit de l'arrestation ou de la détention
régulières d'une personne pour l'empêcher de
pénétrer irrégulièrement dans le
territoire, ou contre laquelle une procédure d'expulsion ou
d'extradition est en cours.
2. Toute personne arrêtée doit être
informée, dans le plus court délai et dans une langue
qu'elle comprend, des raisons de son arrestation et de toute accusation
portée contre elle.
3. Toute personne arrêtée ou détenue, dans
les conditions prévues au paragraphe 1.c du présent
article, doit être aussitôt traduite devant un juge ou un
autre magistrat habilité par la loi à exercer des
fonctions judiciaires et a le droit d'être jugée dans un
délai raisonnable, ou libérée pendant la
procédure. La mise en liberté peut être
subordonnée à une garantie assurant la comparution de
l'intéressé à l'audience.
4. Toute personne privée de sa liberté par
arrestation ou détention a le droit d'introduire un recours
devant un tribunal, afin qu'il statue à bref délai sur la
légalité de sa détention et ordonne sa
libération si la détention est illégale.
5. Toute personne victime d'une arrestation ou d'une
détention dans des conditions contraires aux dispositions de cet
article a droit à réparation.
Article 6 -
Droit à un procès équitable
1. Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue
équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable,
par un tribunal indépendant et impartial, établi par la
loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et
obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de
toute accusation en matière pénale dirigée contre
elle. Le jugement doit être rendu publiquement, mais
l'accès de la salle d'audience peut être interdit à
la presse et au public pendant la totalité ou une partie du
procès dans l'intérêt de la moralité, de
l'ordre public ou de la sécurité nationale dans une
société démocratique, lorsque les
intérêts des mineurs ou la protection de la vie
privée des parties au procès l'exigent, ou dans la mesure
jugée strictement nécessaire par le tribunal, lorsque
dans des circonstances spéciales la publicité serait de
nature à porter atteinte aux intérêts de la justice.
2. Toute personne accusée d'une infraction est
présumée innocente jusqu'à ce que sa
culpabilité ait été légalement
établie.
3. Tout accusé a droit notamment à:
a. être informé, dans le plus court délai, dans une
langue qu'il comprend et d'une manière détaillée,
de la nature et de la cause de l'accusation portée contre lui;
b. disposer du temps et des facilités nécessaires
à la préparation de sa défense;
c. se défendre lui-même ou avoir l'assistance d'un
défenseur de son choix et, s'il n'a pas les moyens de
rémunérer un défenseur, pouvoir être
assisté gratuitement par un avocat d'office, lorsque les
intérêts de la justice l'exigent;
d. interroger ou faire interroger les témoins à charge et
obtenir la convocation et l'interrogation des témoins à
décharge dans les mêmes conditions que les témoins
à charge;
e. se faire assister gratuitement d'un interprète, s'il ne
comprend pas ou ne parle pas la langue employée à
l'audience.
Article 7 -
Pas de peine sans loi
1. Nul ne peut être condamné pour une action ou une
omission qui, au moment où elle a été commise, ne
constituait pas une infraction d'après le droit national ou
international. De même il n'est infligé aucune peine plus
forte que celle qui était applicable au moment où
l'infraction a été commise.
2. Le présent article ne portera pas atteinte au jugement
et à la punition d'une personne coupable d'une action ou d'une
omission qui, au moment où elle a été commise,
était criminelle d'après les principes
généraux de droit reconnus par les nations
civilisées.
Article 8 -
Droit au respect de la vie privée et familiale
1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et
familiale, de son domicile et de sa correspondance.
2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité
publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette
ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une
mesure qui, dans une société démocratique, est
nécessaire à la sécurité nationale,
à la sûreté publique, au bien-être
économique du pays, à la défense de l'ordre et
à la prévention des infractions pénales, à
la protection de la santé ou de la morale, ou à la
protection des droits et libertés d'autrui.
Article 9 -
Liberté de pensée, de conscience et de religion
1. Toute personne a droit à la liberté de
pensée, de conscience et de religion ; ce droit implique la
liberté de changer de religion ou de conviction, ainsi que la
liberté de manifester sa religion ou sa conviction
individuellement ou collectivement, en public ou en privé, par
le culte, l'enseignement, les pratiques et l'accomplissement des rites.
2. La liberté de manifester sa religion ou ses
convictions ne peut faire l'objet d'autres restrictions que celles qui,
prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires,
dans une société démocratique, à la
sécurité publique, à la protection de l'ordre, de
la santé ou de la morale publiques, ou à la protection
des droits et libertés d'autrui.
Article 10 -
Liberté d'expression
1. Toute personne a droit à la liberté
d'expression. Ce droit comprend la liberté d'opinion et la
liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des
idées sans qu'il puisse y avoir ingérence
d'autorités publiques et sans considération de
frontière. Le présent article n'empêche pas les
Etats de soumettre les entreprises de radiodiffusion, de cinéma
ou de télévision à un régime
d'autorisations.
2. L'exercice de ces libertés comportant des devoirs et
des responsabilités peut être soumis à certaines
formalités, conditions, restrictions ou sanctions prévues
par la loi, qui constituent des mesures nécessaires, dans une
société démocratique, à la
sécurité nationale, à l'intégrité
territoriale ou à la sûreté publique, à la
défense de l'ordre et à la prévention du crime,
à la protection de la santé ou de la morale, à la
protection de la réputation ou des droits d'autrui, pour
empêcher la divulgation d'informations confidentielles ou pour
garantir l'autorité et l'impartialité du pouvoir
judiciaire.
Article 11 -
Liberté de réunion et d'association
1. Toute personne a droit à la liberté de
réunion pacifique et à la liberté d'association, y
compris le droit de fonder avec d'autres des syndicats et de s'affilier
à des syndicats pour la défense de ses
intérêts.
2. L'exercice de ces droits ne peut faire l'objet d'autres
restrictions que celles qui, prévues par la loi, constituent des
mesures nécessaires, dans une société
démocratique, à la sécurité nationale,
à la sûreté publique, à la défense de
l'ordre et à la prévention du crime, à la
protection de la santé ou de la morale, ou à la
protection des droits et libertés d'autrui. Le présent
article n'interdit pas que des restrictions légitimes soient
imposées à l'exercice de ces droits par les membres des
forces armées, de la police ou de l'administration de l'Etat.
Article 12 -
Droit au mariage
A partir de l'âge nubile, l'homme et la femme ont le droit de se
marier et de fonder une famille selon les lois nationales
régissant l'exercice de ce droit.
Article 13 -
Droit à un recours effectif
Toute personne dont les droits et libertés reconnus dans la
présente Convention ont été violés, a droit
à l'octroi d'un recours effectif devant une instance nationale,
alors même que la violation aurait été commise par
des personnes agissant dans l'exercice de leurs fonctions officielles.
Article 14 -
Interdiction de discrimination
La jouissance des droits et libertés reconnus dans la
présente Convention doit être assurée, sans
distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la
couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes
autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance
à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou
toute autre situation.
Article 15 -
Dérogation en cas d'état d'urgence
1. En cas de guerre ou en cas d'autre danger public
menaçant la vie de la nation, toute Haute Partie contractante
peut prendre des mesures dérogeant aux obligations
prévues par la présente Convention, dans la stricte
mesure où la situation l'exige et à la condition que ces
mesures ne soient pas en contradiction avec les autres obligations
découlant du droit international.
2. La disposition précédente n'autorise aucune
dérogation à l'article 2, sauf pour le cas de
décès résultant d'actes licites de guerre, et aux
articles 3, 4 (paragraphe 1) et 7.
3. Toute Haute Partie contractante qui exerce ce droit de
dérogation tient le Secrétaire Général du
Conseil de l'Europe pleinement informé des mesures prises et des
motifs qui les ont inspirées. Elle doit également
informer le Secrétaire Général du Conseil de
l'Europe de la date à laquelle ces mesures ont cessé
d'être en vigueur et les dispositions de la Convention
reçoivent de nouveau pleine application.
Article 16 -
Restrictions à l'activité politique des étrangers
Aucune des dispositions des articles 10, 11 et 14 ne peut être
considérée comme interdisant aux Hautes Parties
contractantes d'imposer des restrictions à l'activité
politique des étrangers.
Article 17 -
Interdiction de l'abus de droit
Aucune des dispositions de la présente Convention ne peut
être interprétée comme impliquant pour un Etat, un
groupement ou un individu, un droit quelconque de se livrer à
une activité ou d'accomplir un acte visant à la
destruction des droits ou libertés reconnus dans la
présente Convention ou à des limitations plus amples de
ces droits et libertés que celles prévues à ladite
Convention.
Article 18 -
Limitation de l'usage des restrictions aux droits
Les restrictions qui, aux termes de la présente Convention, sont
apportées auxdits droits et libertés ne peuvent
être appliquées que dans le but pour lequel elles ont
été prévues.